L’homme sans patience, c’est comme une lampe sans huile. Cette citation, qui ne vient pas de Claptrap mais d’Albert de Musset, n’a peut-être jamais eu autant de sens que le vendredi 13 septembre dernier. Après une interminable attente, la saga Borderlands effectue enfin son come-back. Pour parler comme le Beau Jack savait le faire en son temps : ça troue le cul.
J’y ai joué sur Xbox One X à partir d’une version achetée dans le commerce.
4 the win!
Borderlands 3 s’inscrit dans la lignée de ses trois prédécesseurs – j’inclus ici la Pre-Sequel – et reprend les codes qui ont fait le succès de ces derniers. L’histoire se déroule au cœur de plusieurs planètes de la galaxie, et met en scène quatre nouveaux Chasseurs de l’Arche, aux caractéristiques légèrement différentes qu’à l’accoutumée. L’intérêt majeur du titre réside en la complémentarité entre ces protagonistes, chacun disposant de compétences différentes qui, utilisées simultanément et à bon escient, permettent d’écraser les ennemis de manière jouissive. Pensé pour la coop en ligne, ce troisième opus de la trilogie estampillée Gearbox apporte quelques nouveautés de gameplay bien senties. Le loot notamment est désormais séparé : finies les engueulades après un instant-pick de votre partenaire un peu relou. De même, un système de mise à niveau s’instaure lorsqu’un de vos potes un peu à la bourre (ou trop en avance, ça arrive aussi) rejoint votre partie. À cela s’ajoute un système de « ping » (marquer un endroit pour le mettre en lumière auprès de vos coéquipiers) et on obtient un ensemble de mécaniques qui certes n’inventent rien mais demeurent efficaces et appréciables.
Toujours dans un souci d’ergonomie, les menus ont également été repensés. Plus clairs, mieux organisés qu’au préalable, ils sont néanmoins très pénibles en multi – à l’heure où ce test est écrit en tous cas – en raison de nombreux lags. Il faut aussi souligner que la coop en local, si elle est présente, a fait l’objet de nombreuses critiques à cause de l’absence d’écran scindé vertical. On retrouve sans surprise un système de progression façon RPG, qui mêle habilement arbre de compétences, niveaux d’XP et défis à réaliser. Sur ces aspects là encore, Borderlands 3 ne réinvente pas la roue et se contente de réchauffer une recette qui a fait sa renommée. Les fans y trouveront leur compte.
Un rythme fou
Borderlands 3 fait dans le quantitatif. 3, c’est plus que 2, pour le meilleur comme pour le pire. Le côté négatif de « faire du + » s’illustre par la quantité de loot amassée au long de l’aventure. C’est simple : quasiment chaque ennemi tué lâche un gun, bouclier ou autre mod de classe à ramasser. De fait, on se retrouve très, même trop rapidement, à devoir gérer un inventaire plein, et ce avant même d’avoir pu rentrer dans le concret : au début de l’aventure, chaque joueur ne peut s’équiper que de deux armes. La taille de l’inventaire ne pouvant être agrandie que quelques temps plus tard, avec qui plus est une somme d’argent conséquente, on regrette que le jeu contraigne autant à devoir faire des choix – et a fortiori du gâchis – sur quelque chose d’aussi basique. D’autant qu’il propose un arsenal très varié et on ne peut plus complet, avec différents constructeurs d’armes, différentes caractéristiques spéciales, différents « niveaux » (de basique à légendaire)… Frustrant de devoir faire tant de tri avec une telle palette de choix. Heureusement, ce défaut se fait rapidement oublier grâce aux indéniables et nombreuses qualités du titre.
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La campagne en tant que telle est excellente : séparée en 23 chapitres desquels on vient à bout en une trentaine d’heures de jeu en comptant les quêtes annexes, la progression s’avère extrêmement bien rythmée. Jamais lassante, elle met en scène de nombreux personnages à la fois nouveaux et connus (on saluera la présence de Zero, Brick ou encore Tiny Tina), au cœur de quêtes aux objectifs aussi variés que totalement débiles. Contrairement aux premiers jeux de la trilogie, Borderlands 3 nous fait voyager sur plusieurs planètes qui proposent des décors variés, vastes et impressionnants pour la plupart. Métropoles, villes désertes ou autres massifs montagneux constituent autant de paysages magnifiques à arpenter, sublimés par des graphismes en cel-shading qui plaisent toujours autant. Notons que chaque environnement détient quelques items à trouver (enregistrements, cadavres de Clap-Trap) qui, une fois tous collectés, déverrouillent une cache d’arme très intéressante. Ces phases de recherches mettent à contribution les nouvelles techniques de déplacement, à savoir la glissade et l’escalade. Au risque de me répéter, on est encore une fois forcés d’admettre que ces apports n’ont rien de révolutionnaire ; cela n’en est pas moins agréable, le gameplay s’en voit positivement impacté.
Cela étant, la question du loot et de la taille de l’inventaire se pose avant d’effectuer ces recherches. Puisqu’on est quasiment toujours plein, le jeu incite donc indirectement à les effectuer plutôt vers la fin, voire même en new game +. Et c’est peut-être paradoxalement une force : l’ensemble de ces mécaniques confèrent au jeu une incroyable rejouabilité. Avant même d’avoir terminé le jeu avec trois amis, nous faisions en sorte d’optimiser les compétences de nos persos respectifs pour aborder au mieux ledit new game +. L’end-game se voit d’ailleurs beaucoup plus fourni que dans Borderlands 2, avec notamment des arènes et donjons qui viennent renforcer une durée de vie déjà conséquente.
Un café, bien noir, comme mon âme
Sans surprise, l’humour au cinq(uant)ième degré fait son retour. Le titre de Gearbox souhaite avant tout plaire à une communauté présente depuis la première heure et ne change pas ses habitudes. L’humour grossier ne plaira forcément pas à certains, mais j’ai pour ma part passé la plupart du temps à éclater de rire. L’utilisation à outrance de celui-ci empêche toute forme de lassitude, notamment en ce qui concerne les quêtes secondaires. Presque chacune d’entre elle comporte péripéties et twists scénaristiques qui s’appuient sur l’absurde. Borderlands 3 est probablement le seul jeu qui parvienne à rendre mémorables des situations banales, telles qu’aller chercher du café ou livrer des burgers. On ne peut que s’incliner face au génie des scénaristes.
Globalement, la narration mêle donc habilement instants épiques, drôles et parfois même émouvants – quoique ceux-ci soient toujours teintés d’une pointe d’humour noir – avec comme objectif ultime de botter l’arrière-train de Tyreen et Troy Calypso, anti-héros aux chara-designs réussis. Bien que le Beau Jack de l’opus précédent reste l’un des meilleurs antagonistes de l’Histoire, ces jumeaux ainsi que les nombreux boss font largement le café.
La bande-son du jeu, un peu plus discrète que dans le 2, reste globalement convaincante. C’est plutôt les voix (françaises, je n’ai pas joué en VO) qui rendent l’ambiance du titre véritablement réussie. On retrouve un casting de choix côté comédiens / doubleurs français, avec quelques célèbres voix comme celles d’Antoine Tomé ou encore Sylvain Lemarié. Toutes collent en tous cas parfaitement avec les personnalités que l’on rencontre au long de ce périple.