C’est qu’ils ne lésinent pas sur les dépenses chez Ubisoft. Affiches en 4 par 3 dans le métro parisien, florilèges de preview dans la presse spécialisée, stand gigantesque à la Paris Games Week, spot publicitaire réalisé en CGI et même une superbe édition collector pour les amateurs de belles statuettes. Clairement, chez les bretons, on sait pousser un produit façon grande classe, même s’il s’agit que d’un simple DLC… Ah, désolé, mais on vient de me souffler dans l’oreillette que Far Cry 4 n’est pas un DLC et qu’en plus ça défonce. Tout s’explique.
DLC or not DLC. On s’en fout de la question
Oui, je sais, mon introduction est un peu limite et va certainement en froisser quelques-uns. Mais vous aurez beau dire que je suis méchant, un peu trop taquin, ou pire, que je m’adonne à cette nouvelle mode de l’Ubi Bashing, vous ne m’empêcherez jamais de penser que Far Cry 4 ressemble méchamment à un bon gros DLC de Far Cry 3. Et puis d’abord, c’est quoi un DLC au final ? C’est juste un contenu téléchargeable qui apporte des éléments supplémentaires à un jeu, sans pour autant en modifier le fond. Comme de nouveaux personnages pour un jeu de baston, de nouvelles maps pour un FPS multi ou bien une nouvelle histoire agrémentée de missions supplémentaires pour un GTA. En partant de ce postulat, Far Cry 4 possède toutes les caractéristiques d’un DLC classique. Une nouvelle histoire, un nouveau cadre et quelques nouvelles features qui viennent se greffer autour du squelette du dernier épisode. C’est-à-dire un FPS en monde ouvert où il est possible de faire évoluer son personnage en débloquant des points de compétence, fabriquer différents types d’accessoires en récupérant plantes et peaux de bêtes, grimper sur le sommet de tours pour dégager la carte et prendre le contrôle d’avant-postes pour libérer une zone de la menace ennemi. Oui, Far Cry 4 ressemble à s’y m’éprendre à Far Cry 3. Et cette impression de redite est d’autant plus forte si l’on a fait les quatre cents coups sur les Rook Islands quelques jours ou semaines avant d’embarquer pour Kyrat. Du coup, il y a de quoi se demander pourquoi les équipes d’Ubisoft Montreal on fait preuve d’autant de timidité. Par peur de prendre des risques ? Par confort et ainsi s’assurer de ne pas heurter les fans ? Ou tout simplement par pur manque de temps ? Car Far Cry 4 apporte bien son petit lot de nouveautés, comme l’utilisation d’un grappin pour jouer de la verticalité offerte par le nouvel environnement, l’intégration d’un nouveau mode de jeu coopératif ainsi qu’un faune nettement plus fournie, mais le tout manque de poids et d’impact pour vraiment se démarquer de Far Cry 3. Mais bon, ce que je ne vous ai pas encore dit jusque-là, c’est que Far Cry 4 a beau reprendre la même structure que son illustre prédécesseur, il le surclasse dans tous les domaines. Et même de loin. Ce qui en fait donc un PUTAIN DE BON JEU. Et, personnellement, c’est tout ce que je lui demandais.
Kyrat, qui peut te battre !
Avant d’être un FPS à monde ouvert, Far Cry 4 est une destination. Région fictive située en plein cœur de l’Himalaya, Kyrat, qui prend vraisemblablement toute son inspiration du Tibet, fait autant d’effet qu’une grande bouffée d’air frais et s’affiche comme une somptueuse carte postale vivante où il fait bon de s’y perde pour y déambuler des heures durant. On y est tellement bien qu’on en oublie souvent les missions pour aller se balader dans les hauteurs de cette gigantesque aire de jeu à tenter de dénicher un temple secret ou un nouveau spot pour une descente en wingsuit. Et si artistiquement le jeu est d’une beauté à en pleurer, la technique lui emboite le pas pour nous offrir une réalisation loin d’être dégueulasse avec une distance d’affichage énorme, une végétation luxuriante et des paysages bourrés de détails. Néanmoins, histoire de chipoter trente secondes, le jeu est assez timide du côté des effets de particules et de fumée et on sent même comme une légère timidité sur la gestion de la lumière. Si bien que sur certains plans, notamment lorsque la luminosité est au plus bas, l’image manque de relief et de mordant. Mais en pleine lumière, sur le haut d’une colline verdoyante, quelques éléphants au loin et l’Himalaya en toile de fond, on en aurait presque envie de poser la manette pour admirer le spectacle. Par contre, du côté du scénario, c’est déjà moins reluisant. On incarne le jeune Ajay Ghale qui, afin de rendre un dernier hommage à sa mère en dispersant ses cendres sur sa terre natale, s’envole pour Kyrat et se retrouve enrôlé dans une cellule révolutionnaire qui lutte contre le joug du dictateur local Pagan Min. Un espèce de mix entre Vladimir Poutine et Plastic Bertrand qui n’hésite pas à planter une lame dans la carotide de l’un de ses hommes s’ils ne respectent pas ses ordres à la lettre. Un psychopathe, tout de rose vêtu, qui ferait presque passer ce brave Vaas pour un vulgaire homme de main excentrique. Malheureusement, le scénario ne décolle jamais, Pagan Min est très mal exploité et la narration est particulièrement mauvaise. Comme dans Far Cry 3 en fait.
Un pot tout sauf pourri
Comme je le disais dans le premier paragraphe de cet incroyable billet que vous êtes en train de lire, enfin je l’espère, Far Cry 4 reprend trait pour trait la même architecture que Far Cry 3. De ce fait, on se sent comme à la maison très rapidement et une fois passé les premières cinématiques qui posent les bases de l’histoire, on a qu’une hâte, c’est emprunter le premier véhicule croisé pour aller découvrir les environs et commencer à s’amuser. Car s’il y a bien un segment où le FPS d’Ubisoft ne se loupe pas, c’est sur le fun qu’il procure. Que l’on soit au sommet d’une colline à se faire attaquer par un aigle, à chasser le sanglier pour se confectionner un holster flambant neuf ou à l’arrière d’une sulfateuse à cracher du plomb sur un convoi ennemi lourdement armé, Far Cry 4 multiplie les situations grisantes comme Jesus les petits pains sans jamais tomber dans la monotonie. En plus des missions principales et annexes, le jeu est bourré d’événements aléatoires comme traquer un messager, libérer des otages ou encore empêcher l’exécution de pauvres innocents dans un village. À Kyrat on ne s’ennuie jamais et les possibilités d’action sont presque infinies. On peut foncer dans le tas et défourailler comme un porc à l’aide d’un large choix de pétoires, la jouer discrète en enchaînant les exécutions au corps à corps ou encore débouler à bord d’un petit hélicoptère, le buzzer, pour fondre sur l’ennemi depuis les airs. En clair, et je pense que vous l’avez bien compris, Far Cry 4 est jouissif et vous énumérer toutes les folles choses que l’on peut y faire me prendrait des heures. Mais nettement moins que le temps nécessaire pour venir à bout de ce qu’a à offrir le jeu. En ligne droite, comptez bien une grosse quinzaine d’heures pour voir le générique de fin défiler et doublez l’addition pour retourner la carte dans tous les sens. Une activité qu’il est maintenant possible de faire en duo à l’aide d’un mode coopératif qui se fond à merveille dans la trame principale. Mais si en compagnie d’un ami l’expérience gagne en intensité et en fun, il suffit d’être accompagné d’un inconnu qui n’en fait qu’à sa tête pour que ça tourne vite à la bérézina. Et croyez-mo, j’en ai fait la triste expérience un peu trop souvent. Comme quoi, à Kyrat, comme partout ailleurs, il vaut mieux être seul que mal accompagné.
Sous ses faux airs de gros DLC, Far Cry 4 n’en demeure pas moins un très de bon jeu et certainement l’un des meilleurs FPS de l’année. Pour ne pas dire le meilleur. En même temps, comment ne pas tomber amoureux de Kyrat avec ses vallées verdoyantes et son imparable vue sur l’Himalaya, magnifiquement mise en valeur par une réalisation graphique de haute volée. Et en plus d’une expérience solo tout simplement jouissive, où l’on peut passer d’une séance de chasse dans les hautes herbes à la charge d’un camp ennemi à dos d’éléphant après avoir dévalé le flanc d’une montagne en wingsuit, le jeu intègre un mode coopératif plutôt bien fichue qui, si l’on est bien accompagné, rend l’expérience globale encore plus savoureuse. Au final, DLC ou pas, Far Cry 4 est un indispensable de cette fin d’année.